Tribune - Le patrimoine financier des Français

Livret A, PEL, assurance-vie, valeurs mobilières...Dans une grande enquête annuelle, l’INSEE analyse le patrimoine des Français au titre de l’année 2018. L’institut spécialiste de la statistique dresse le tableau des actifs des ménages. La diminution du patrimoine financier est importante. Décryptage par Stéphane Fantuz, Président de la Chambre Nationale des Conseillers en Investissements Financiers.
Tribune - Le patrimoine financier des Français

Un patrimoine financier en recul. C’est ce qu’il faut retenir de la dernière grande enquête initiée par l’INSEE qui a analysé les actifs mobiliers et immobiliers détenus par les Français. Si la moitié d’entre eux, détiennent au moins un actif financier, ils ne sont en revanche que 7,4 % à posséder un portefeuille diversifié. À l’opposé, 12 % sont sans produits financiers.

Le livret A moins prisé qu’en 2015

8 français sur 10 souscrivent pour des placements sécurisés et défiscalisés, en majorité le livret A (72,8 % des ménages en 2018). Viennent ensuite, le livret de développement durable et solidaire (34,6 %), le livret d’épargne populaire (18,4%) et 12,4 % pour le livret jeune. Après une décennie d’augmentation, ces différents produits reculent (-2,5%), particulièrement pour le livret A, en raison d’un taux d’intérêt bas, s’établissant à 0,75 % depuis août 2015. Par ailleurs, trois facteurs ont engendré de nombreuses fermetures du Livret A : l’inflation, les outils de contrôle limitant la multi-détention et la Loi relative aux comptes bancaires inactifs et aux contrats d’assurance-vie en déshérence (2016).

L’assurance-vie plébiscitée

L’assurance-vie reste le placement financier privilégié et progresse depuis 10 ans. 4 Français sur 10 y ont recours, soit 2,5 % de plus qu’en 2015. Elle permet d’accumuler un patrimoine au cours de la vie et de le transmettre en succession, dans des conditions fiscales avantageuse ; d’où son succès auprès des plus de 60 ans (44,3 % des ménages de cette classe d’âge). Sécurisant au moins une partie l’épargne, 63,5 % des assurances-vie sont souscrites en fonds euros garantis (en repli de 2,5%). Mais les Français ont aussi une appétence au risque : les contrats multisupports ont progressé de 9,3 % à 11,4 % en 3 ans.

Prévoir sa retraite

L’épargne retraite, détenue par 13,3 % des ménages début 2018, est en légère baisse par rapport à 2015 (– 1 point). Les détenteurs se répartissent entre trois types de produits :

- l’épargne retraite complémentaire volontaire (36,2 %),
- la surcomplémentaire (44,0 %),
- le plan d’épargne retraite populaire (PERP) (32,0 %)

L’épargne retraite est privilégiée par les agriculteurs, artisans, commerçants, chefs d’entreprise et professions libérales, qui sont près d’un tiers à détenir ce produit (y compris un PERP).

L’attrait pour le PEL

Début 2018, 1 Français sur 3 détient un produit d’épargne logement. Si le CEL est en baisse constante ( -5,6 % entre 2004 et 2018), le PEL repart à la hausse (+ 5 points entre 2010 et 2018). Pourquoi ? Le CEL est fiscalisé depuis janvier 2018. Le PEL offre une rémunération de long terme, plus attractive que le Livre A, tout en étant sécurisée. La fiscalisation annoncée des PEL ouverts à compter du 1er janvier 2018 a constitué un appel d’air en 2017. Par ailleurs, l’épargne logement reste stable, toujours détenue par les couples (38,4 %). Les moins de 30 ans, sans enfant, l’utilisent comme apport pour un premier achat immobilier. Les couples avec enfants, en font usage en prévision de travaux, de changement de résidence principale. On notera enfin une forte détention du PEL chez les cadres et de professions libérales qui vont le conserver à la retraite, dans une proportion importante : 43,4 % contre 26,6 % en moyenne pour l’ensemble des retraités, début 2018.

Valeurs mobilières en repli

La crise financière et économique a conduit les Français à délaisser les valeurs risquées depuis 2008. Le repli a été important entre 2004 et 2010 (– 4,9 points). Il se poursuit avec moins d’ampleur depuis : – 2,8 points entre 2010 et 2015, puis – 0,9 point entre 2015 et 2018. De fait, la détention de comptes-titres ordinaires continue de diminuer (9 % des ménages en possèdent en 2018). Malgré les avantages fiscaux qu’il offre, le plan d’épargne en actions (PEA) n’attire pas plus de ménages que les comptes- titres ordinaires. Plus généralement, l’on constate que les valeurs mobilières sont appréciées par les cadres et professions libérales - y compris retraités, représentant 35,6% de la détention.


 
En conclusion, la détention du patrimoine financier des Français diminue. Après dix ans de hausse, le livret A recule depuis 2015. La baisse des valeurs mobilières se poursuit. À l’inverse, l’assurance-vie, sur supports risqués notamment, et l’épargne logement sont en hausse. Une stabilité de la politique fiscale est impérativement attendue de manière à permettre aux épargnants de mieux répartir leurs actifs. Mais surtout - et nous l’appelons de nos voeux depuis de nombreuses années - il serait temps de mettre en place une véritable éducation/communication économique et financière à destination des Français. Elle permettrait notamment un retour à une économie réelle plus vertueuse et un financement plus aisé de nos entreprises.


 

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